Kim Marra : la chambre comme terrain d’exploration
Kim Marra : la chambre comme terrain d’exploration
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Kim Marra : la chambre comme terrain d’exploration

Fragments de souvenirs, gestes intuitifs, objets du quotidien qui prennent une charge sensible : Kim Marra compose des intérieurs mentaux, ouverts et habités. Une peinture à l’huile nourrie de collages, de glissements et d’images récurrentes, où l’espace domestique devient paysage émotionnel. Nous avons eu le plaisir d’échanger avec l’artiste autour de son processus et de sa manière singulière d’habiter la mémoire. Rencontre.

Par Rise Art | 04 juin 2025

Votre travail repose sur le collage, le déplacement, la recomposition, des procédés souvent associés à la fragmentation. Comment ces techniques vous aident-elles à explorer la mémoire et l’identité dans les espaces domestiques ? 

Quand je peins, je pense souvent à construire et déconstruire des espaces. Parfois, ce sont des lieux que j’ai connus, d’autres fois, ils sont entièrement imaginés. Ce processus reflète la fragilité de la mémoire, ce que je trouve particulièrement intéressant.

Kim Marra: Exploring the Emotional Architecture of Domestic Space
Kim Marra lors de son exposition solo « My Room Is Not My Room » à LA | Crédits photographiques : Luna Hao

Pouvez-vous nous décrire votre processus de création ? Commencez-vous par un objet ou un souvenir précis, ou la composition évolue-t-elle de manière plus intuitive ? 

La plupart du temps, je travaille de façon très intuitive. Je commence généralement par tracer quelques lignes ou formes qui orientent la composition, puis je laisse la peinture évoluer. L’œuvre change et grandit considérablement du début à la fin.

Kim Marra: Exploring the Emotional Architecture of Domestic Space
Exposition : « My Room Is Not My Room » à LA | Crédits photographiques : Luna Hao

Bien que vous travailliez principalement à l’huile, vos compositions ont souvent une dimension sculpturale et architecturale. Comment abordez-vous l’espace et la profondeur dans votre pratique picturale ? 

J’aborde toujours une peinture comme si je créais un espace ; je veux que le spectateur ait l’impression de pouvoir entrer dans cette réalité alternative. C’est ce qui rend le travail en deux dimensions si captivant, explorer comment créer un espace qui n’existe pas physiquement est un défi dont je ne me lasse jamais.

Kim Marra: Exploring the Emotional Architecture of Domestic Space
Water Falling par Kim Marra (huile sur toile, 2021, 91 x 122 x 4 cm)

Dans votre exposition personnelle « My Room Is Not My Room », vous remettez en question la chambre comme espace personnel stable. Qu’est-ce qui a suscité votre intérêt pour les dimensions psychologiques des intérieurs domestiques ? 

Comme tout le monde, j’ai traversé des périodes de ma vie plus ou moins stables. Je réfléchis généralement aux espaces qui ont marqué ces moments et à ce à quoi je me raccrochais pour créer un sentiment de stabilité. Souvent, c’était ma chambre ou mon lit. Il est naturel et humain de chercher la sécurité dans un abri, c’est pourquoi j’aime me concentrer sur ces objets réconfortants dans mon travail.

Kim Marra: Exploring the Emotional Architecture of Domestic Space
Exposition : « My Room Is Not My Room » à LA | Crédits photographiques : Luna Hao

Comment percevez-vous la relation entre les objets et l’identité dans votre travail ? Les rideaux, oreillers et plantes de vos peintures ont-ils une dimension symbolique ou émotionnelle ? 

Je ne dirais pas que ces objets sont nécessairement liés à l’identité, mais plutôt qu’ils symbolisent le confort. Je m’intéresse à la façon dont de tels objets peuvent évoquer un sentiment de sécurité, et si les présenter de manière abstraite ou non traditionnelle peut modifier, voire remettre en question, ce sentiment.

Kim Marra: Exploring the Emotional Architecture of Domestic Space
Exposition : « My Room Is Not My Room » à LA | Crédits photographiques : Luna Hao

Votre travail soulève la question de savoir si un espace peut encore « appartenir » à quelqu’un une fois qu’il est imprégné de mémoire, de culture et de perception. Considérez-vous vos peintures comme une forme d’architecture psychologique partagée ? 

Absolument ! Bien que je fasse souvent référence à des espaces personnels de ma propre vie, j’aime utiliser des textures et des motifs reconnaissables. J’aime l’idée que le spectateur puisse projeter ses propres expériences sur l’œuvre et s’y identifier de manière personnelle.

Dans l’œuvre Gold Velvet, le rideau agit comme un drapé théâtral, à la fois barrière et invitation. Qu’est-ce qui vous a attirée vers la métaphore théâtrale, et comment influence-t-elle le reste de l’exposition ?

J’aime utiliser des rideaux dans mon travail car ils peuvent prendre différentes significations selon le contexte et le spectateur. Que ce soit dans nos propres maisons ou sur une scène, ils servent à nous protéger et à tenir les autres à distance, même si ce n’est que brièvement. Jouer avec l’idée de théâtre est toujours amusant et remet en question notre perception de ce qui est réel.

Kim Marra: Exploring the Emotional Architecture of Domestic Space
Gold Velvet par Kim Marra extrait de son spectacle solo « My Room Is Not My Room » 

Les objets domestiques deviennent dans votre travail des signifiants visuels plutôt que des éléments utilitaires. Y a-t-il une tension entre décoration et fonction, ou entre regarder et habiter ?

Je ne suis pas certaine qu’il y ait une tension directe entre décoration et fonction dans mon travail, bien que je pense que c’est une question centrale dans l’histoire du design et de l’architecture, ce que je trouve très intéressant. À différentes époques, les artistes et artisans ont privilégié l’un ou l’autre, ou ont tenté de marier les deux, et j’aime explorer ces deux aspects.

Y a-t-il des intérieurs, réels ou imaginés, qui vous ont laissé une impression durable et ont influencé ce corpus d’œuvres ?

Ma maison d’enfance à New York est probablement l’espace le plus influent auquel je fais référence. L’endroit où nous passons nos années formatrices est inextricablement lié à ce que nous sommes, et cet environnement a vraiment influencé la façon dont j’aborde l’espace et l’utilise dans mon art.

Kim Marra: Exploring the Emotional Architecture of Domestic Space
Outdoor Movie par Kim Marra (Huile sur toile, 2022, 76 x 76 x 4 cm)

Dans quelle mesure êtes-vous consciente de l’ambiguïté comme stratégie ? Êtes-vous intéressée par le fait de laisser un espace interprétatif aux spectateurs pour qu’ils projettent leurs propres souvenirs ou associations ?

Certainement. Lorsque je crée une peinture, je n’ai pas d’idée fixe de ce que je veux que le spectateur pense ou ressente. Je crée des espaces que je trouve intrigants et engageants, et je veux que le spectateur ait sa propre expérience personnelle de ces espaces, indépendamment de mes intentions initiales.

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